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S. Catherine du Sacré-Coeur (Edith Marquis)

Parler de S. Catherine, Fille de la Sagesse, c'est évoquer tout un passé, « une véritable institution à Edmundston », comme on l'a si bien dit.

Fille de Maxime Marquis et de Flavie Côté, S. Catherine est née à St.Agatha, Maine, le 2 août 1898. Elle fit ses études chez les Filles de la Sagesse où elle obtint les titres qui lui permirent d'enseigner au Maine.

En 1920, elle entrait au Noviciat des Filles de la Sagesse à Ottawa et y faisait profession le 16 juillet 1921. On lui demanda alors d'œuvrer à Edmundston et elle y fut du premier août 1921 jusqu'en septembre 1978 alors que, voyant ses forces diminuer, elle consent à passer les mois d'hiver à Nicolet, où elle pourrait participer à l'Eucharistie quotidienne sans sortir. L'hiver se prolongea jusqu'à son décès qui survint onze mois plus tard. Ses funérailles eurent lieu le 8 août 1979 en la Cathédrale Immaculée-Conception où un clergé nombreux et une foule dense vinrent lui rendre un dernier hommage.

S. Catherine, nous l'avons dit, est venue à Edmundston en 1921 et y est restée jusqu'à la fin de sa carrière. Elle fut une grande éducatrice et une excellente collaboratrice paroissiale. Religion et éducation sont les deux grands volets de sa carrière d'enseignante.

Dès le début de son itinéraire, une grave maladie la conduisit aux portes de la mort. Le Seigneur, semble-t-il, nous la laissa pour accomplir l'œuvre fructueuse qui fut la sienne. Cet accroc de santé devait influer sur son avenir, car bien que munie des brevets de la Province, elle ne poursuivra pas comme ses consœurs des études universitaires. Ce qui fait que S. Catherine sera appliquée très tôt à l'enseignement; ce qui fait également qu'elle sera une autodidacte. Les solides notions acquises à St.Agatha et à Edmundston, elle prendra à son compte de les cultiver, de les enrichir, avec un sens rare de l'adaptation, au rythme du progrès et du développement des sciences de l'instruction et de l'éducation, de sorte que son bagage pédagogique n'aura jamais rien de figé. Elle trouvera toujours le moyen de mettre à jour ses connaissances, se familiarisant avec les méthodologies nouvelles, les combinant avec les anciennes et usant du meilleur de tout. Son esprit d'initiative, son génie inventif ne connaissaient point de repos : les années scolaires aussi bien que les vacances étaient jalonnées d'activités sans cesse répétées, renouvelées, amplifiées et enrichies. Un important matériel didactique, produit de son invention ou acheté, passa par ses mains et celles de ses élèves. Elle faisait feu de tout bois, acceptait avec reconnaissance les dons en papier de Fraser, de l'imprimerie April. Et si les librairies Madawaska, Garneau et de la Bonne Presse pouvaient parler, que ne nous diraient-elles pas de ses achats de fournitures et de livres pédagogiques? C'est jusqu'en Europe au besoin qu'elle s'adressait pour garnir son dépôt des objets les plus hétéroclites auxquels elle recourait constamment pour illustrer son enseignement.

Collaboratrice paroissiale, elle le fut foncièrement. On lui avait confié la préparation à la première Communion, à la Confirmation et à la Communion solennelle (Profession de foi) et, aux jours de l'Action Catholique, la Croisade eucharistique. Ce mandat lui remettait donc l'initiation de toute la population des enfants baptisés d'âge scolaire de la paroisse Immaculée-Conception, et ce mandat dura 37 ans. Le choix de cette institutrice pour inculquer à des âmes neuves les vérités de la Foi, les initier aux Sacrements, aux vertus chrétiennes, était des plus judicieux; car, chez elle, la piété était bien comprise. Dieu était le point de départ et le point d'arrivée de son enseignement dégagé de dévotions et de pratiques puériles. C'est par tout son enseignement, globalement qu'elle amenait comme en filigrane les pensées de Dieu, de sa grandeur, de ses perfections, de sa bonté pour l'homme. Certes, elle donnait tout le temps requis et raisonnable à la transmission des vérités chrétiennes, à la formation à la piété, aux préparations liturgiques et à la réception des Sacrements. Elle savait aussi inclure dans son programme religieux les décors de ces fêtes qui marquent les enfants et leur laissent des souvenirs pieux. Ce faisant, elle s'efforçait dans ces déploiements religieux de souligner davantage l'aspect de fête que le côté folklorique qui pouvait s'y mêler. Et il y a ici une allusion à la fête dite bénédiction des enfants, à celle de la bénédiction des gorges, de la Fête-Dieu, de la Présentation de Marie au temple, etc. Il lui importait de défendre les enfants contre une certaine routine ou entraînement, contre une piété moutonnière faite d'imitations et non de convictions. S. Catherine a travaillé à initier les jeunes aux œuvres catholiques, à l'amour des déshérités, à traduire leur appartenance chrétienne en agir chrétien.

La préparation à la première Communion était l'objet de ses soins les plus particuliers. De quel tact, de quelle onction elle usait pour remplir cette tâche. Avec quelle sollicitude elle suivait et étudiait les enfants pour les aider, les éclairer et, au besoin, les stimuler. L'acte de la première des Communions avait toute son importance. Ne reste-t-il pas dans le passé de chacun comme un centre d'où rayonnent les plus réconfortants souvenirs? N'est-il pas un moment privilégié et déterminant de l'avenir religieux de chacun?

Mais là ne s'arrêtait pas le zèle de S. Catherine. Elle savait que trop léger était le bagage de science au sortir du Catéchisme de première communion. Il fallait voir à la persévérance et c'est ce qui fit d'elle l'apôtre de l'enseignement religieux auprès de tous les jeunes du primaire jusqu'à la profession de Foi. C'est alors que ses aides, les autres religieuses et les enseignantes laïques, avaient recours à sa compétence. Ainsi S. Catherine évangélisait doucement, sûrement, profondément.

II nous semble à propos de souligner sa vénération pour la Vierge qu'elle transmettait presque par osmose à ses élèves. Comme il devenait facile aux maîtresses des grades supérieurs de présenter aux grands élèves la Vraie Dévotion à la Sainte Vierge et son corollaire, la parfaite Consécration.

S. Catherine, communicatrice par excellence, a été un « professeur » de religion émérite. J'ai à peine effleuré le bilan de son action religieuse, de sa compétence catéchétique remarquable, de sa piété simple et sans affectation.

Est-il étonnant de compter parmi ses élèves : six prêtres, un religieux, vingt-trois religieuses et de ne pouvoir dénombrer ceux et celles qui, dispersés dans des foyers chrétiens ou moins chrétiens, peuvent reconnaître ouvertement ou secrètement que la bougie d'allumage de leur courage, de leur durée, c'est la formation religieuse donnée par S. Catherine? Et voilà pour la partie, le volet religieux de la présence de S. Catherine dans la vie paroissiale.

Éducatrice, c'est l'autre pan de cette présence dans la ville d'Edmundston.

Éducatrice, S. Catherine le fut de toutes les fibres de son être. Si elle eut dû écrire une thèse, je suis persuadée qu'elle aurait traité de la formation du cœur tant elle était convaincue que « tant vaut le cœur, tant vaut l'homme » et que où le cœur manque, rien ne peut le remplacer.

Cette conscience de l'importance de la formation du cœur lui donnait un respect profond de l'enfant, cet homme en puissance. Aussi respecter les enfants comme des êtres libres, les aimer, les aider à traduire en actes les bons sentiments, à détruire les mauvais, telle a été la mission d'enseignante de S. Catherine.

Pour former, elle étudiait le terrain avant d'agir et sa tactique était différente selon le naturel des enfants; douce avec les faibles, plus exigeante avec les plus doués et capables de plus d'efforts. Elle traitait chaque âme d'enfant avec tact, se rappelant que collaboratrices des parents, nous n'élevons pas nos élèves pour un jour; c'est toute la vie qu'il faut assurer. Préparer les enfants à la vie, comme elle a bien joué ce rôle S. Catherine! Confidente discrète des gros chagrins de l'enfance qu'elle a consolée, elle a été une maîtresse bonne et intelligente sachant encourager les efforts, reconnaître la bonne volonté, exciter à de nouveaux essais, exercer à la bonté et à l'humilité, vertus qui en renferment tant d'autres. C'est dans l'enseignement des diverses matières qu'elle jugeait à propos d'amener sans « moraliser » à des comportements moraux et chrétiens.

Enseigner pendant quarante ans à des jeunes enfants, ceux de « grade un », comme on disait à cette époque, c'est tout un exploit et S. Catherine l'a accompli.

Son rayonnement religieux et pédagogique, son influence furent grands. On faisait appel à sa compétence et à son expérience à l'occasion de sessions pédagogiques; on la consultait individuellement ou en groupe. Jamais elle ne se lassait d'écouter, d'aider, de prêter, de partager, de donner et de recommencer.

S. Catherine se devait de durer au « grade l ». Celle qu'on relançait jusque dans son couvent ne pouvait que difficilement se contraindre à refuser les commençants et les parents de même... au point qu'il en fut pour passer leur enfant par la fenêtre pour leur assurer une place dans la salle de classe de la sœur du « grade l ». Heureusement que par le biais de l'enseignement religieux, elle les rejoignait tous, ces chers débutants.

Simple d’allure, des relations faciles et agréables, enthousiaste, très religieuse, convaincue de sa mission, S. Catherine a marqué de son dynamisme et de ses convictions des centaines d'enfants de toutes les couches de la société.

S. Catherine était têtue, têtue de la patience, de la foi, de la persévérance qui savent fouler les sentiers arides pour lancer et relancer le projet de la religion et celui de l'éducation, deux éléments indissolubles et indissociables dans sa pensée.

S. Catherine était patiente, condescendante, apostolique... traits qui éclatent encore admirablement lorsqu'à la retraite, elle sera l'aimable portière dont on se souvient.

S. Catherine, je n'ai pas eu le bonheur de travailler à vos côtés, mais j'ai été votre compagne dans la communauté d'Edmundston et trois petits mots résument à mes yeux votre apostolat: « Que croyons-nous? - Que célébrons-nous? - Que vivons-nous? »

S. Catherine, vous avez été loyale, loyale à l'Église, loyale à votre institut, loyale à la société, loyale aux parents de vos élèves. Nous vous en sommes reconnaissants: Nous vous rendons hommage parce que nous vous admirons et nous vous aimons.

Au pays madawaskayen, une éducatrice a passé. Son souvenir perdure dans le cœur de centaines d'hommes et de femmes. On la nomme S. Catherine.

S. Simone Re, f.d.l.s.
1989
Université de Moncton campus d'Edmundston Société Historique du Madawaska Ville d'Edmundston Patrimoine Canadien