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L'artisanat : le tissage

Le tissage, le travail au métier, faisait partie des tâches habituelles des pionniers du Madawaska dans la première partie du 19e siècle et de celles de leurs descendants dans les cent ans qui suivirent. Ce n'est que depuis environ un demi-siècle que ce travail domestique est perçu comme de l'artisanat, dans le sens moderne du mot, et que le métier à tisser ne se trouve qu'en de très rares foyers.

La fabrication de pièces au métier a cependant encore les mêmes exigences et ce sont toujours les femmes qui y excellent. Ces pièces tissées étaient de la toile de lin, de l'étoffe ou de la catalogne.

La toile de lin était tissée à partir de la « filasse » que l'on extrayait du lin, une plante textile qui possède dans sa tige des fibres très fortes qui, une fois filées, donnent un fil apte à fabriquer la toile, au métier à tisser. L'opération de base consiste à entrelacer à l'aide d'une navette les fils de chaîne, en longueur et les fils de trame, en largeur. Le tissu ainsi obtenu servait à faire chemises, draps, nappes ou essuie-mains.

L'étoffe, elle, était tissée à partir de la laine. Après la tonte du mouton, et une fois la laine lavée, on se servait de cardes pour la démêler. Les cardes étaient faites de deux planchettes de bois emmanchées dans lesquelles étaient fixées des pointes fines en fer. On plaçait la laine sur une carde et avec l'autre on la peignait. Vers 1850, apparurent les moulins à carde où les fermiers pouvaient faire carder leur laine. La laine cardée, il fallait la filer pour donner aux fibres de laine la solidité et la longueur voulue; on enroulait en spirale en même temps qu'on joignait les fibres entre elles. Cette opération se faisait à l'aide du rouet. Le fil de laine produit était prêt pour le tissage de l'étoffe.

L'étoffe produite était enroulée sur une large planche en attendant que la tisseuse se fasse couturière et l'utilise pour fabriquer paletots, pantalons de travail, habits propres ou couvertures.

Une autre pièce d'artisanat produite au métier à tisser est la catalogne, qui est une laize ou une couverture de luxe. On en fabrique encore aujourd'hui au Madawaska et on peut en admirer dans des expositions d'artisanat. C'est une sorte de tissage dans lequel entrent du coton et des lanières de guenille. La laize servait beaucoup autrefois à orner le plancher et la couverture, à garantir du froid, dans le lit.

Pour comprendre un peu ce qu'était le métier à tisser pour les Madawaskayens, surtout entre 1785 et 1850 environ, il faut savoir que ces intrépides pionniers confectionnaient presque tout, étant trop pauvres ou devant aller trop loin pour acheter des vêtements et d'autres lainages. Il faut aussi savoir que l'abbé Thomas Albert a écrit: « Dans toutes les maisons, le « métier » et le rouet étaient en honneur. La jeune fille qui n'avait pas tissé sa pièce au métier ne pouvait guère trouver un parti avantageux puisque la possession de cet art était la dot... »

Cet art, dans quelle mesure existe-t-il encore au Madawaska? Très peu dans les foyers. Mais il est plus que florissant dans les ateliers de « Madawaska Weavers » (Les tisserands du Madawaska), entreprise des demoiselles Gervais, à Saint-Léonard.

En effet, il s'y fait la confection de tissus de façon artisanale, c'est-à-dire sur des métiers à tisser comme autrefois. Mais, les propriétaires ont, le long des ans, perfectionné et raffiné cette confection. Elles veillent et participent à la transformation de milliers de verges de tissu en produits finis par quelque trente personnes à leur emploi, pour le tissage et la couture. Ainsi, à la production de cravates et de foulards surtout, dans les années 1940, l'entreprise a ajouté celle des jupes, des napperons, etc.

Ces produits confectionnés de façon artisanale par les Tisserands du Madawaska sont très recherchés pour leur grande qualité et leur beauté. Ils sont vendus à des merceries régionales, mais surtout à de grands magasins de Montréal, Qc et de Saint Jean, N.-B. L'entreprise jouit donc d'une grande réputation et d'un haut prestige.

Voilà, très brièvement, ce que fut autrefois le tissage au métier, au Madawaska, et ce qu'il est aujourd'hui.

Guy R. Michaud
1989
Université de Moncton campus d'Edmundston Société Historique du Madawaska Ville d'Edmundston Patrimoine Canadien